Laurent Gaudé saltó a la fama al ganar en 2004 el prestigioso premio Goncourt con su novela El sol de los Scorta Le soleil des Scorta. En ella se narra la vida de tres generaciones de una familia italiana que habiendo nacido en la más absoluta pobreza consiguen abrirse camino en la vida porque se conforman con poco y para ser felices les basta con estar juntos y con que les dé el sol en la cara. La novela emotiva y poética le valió además del premio el ser traducido a más de veinte idiomas. Aquí en España le publica Salamandra y es de esperar que esta colección de relatos que acaba de salir en Francia pronto sea traducida al español.
Les oliviers de Négus, los olivos de Negus está formada por cuatro relatos totalmente independientes que tienen como único nexo de unión a la muerte. Montaigne dice que la mejor manera de perder el miedo a la muerte es acostumbrase a ella, considerarla como lo que es, una consecuencia inevitable de la vida y en estos cuatro relatos el autor nos aproxima a la muerte desde distintos enfoques. El relato que abre el volumen narra el momento en que un hombre conoce la muerte de un anciano al que con el paso de los años y las sucesivas vacaciones acaba cogiendo gran estima. Al principio el narrador no comprende bien el italiano cerrado del anciano, poco a poco la comunicación entre los dos es más fluida y entonces el anciano le cuenta sus desventuras en Etiopía durante la aventura colonial de Mussolini. Pero el verdadero nudo del relato es el proceso y los acontecimientos que desencadena el fallecimiento del anciano en la psique del protagonista.
El segundo de los relatos nos traslada en el tiempo a la caída del imperio romano. Un centurión es destinado a un fuerte en los confines del imperio romano y cuando llega se encuentra que el destacamento al que viene a relevar se ha convertido en una banda de salvajes que poco se diferencian de los salvajes que están al otro lado del muro. Mata al comandante del campo y extrañamente siente como su cuerpo se ve apoderado de una parálisis que como una gangrena se extiende por su cuerpo como una metáfora de la propia decadencia del imperio y de sí mismo.
En el tercer relato ambientado en la primera guerra mundial no cuenta cómo los campesinos de un pueblo despedazan a un golem que ha creado la propia tierra para defenderse de la continua agresión que supone la guerra. En una bellísima imagen Laurent Gaudé cuenta como la tierra se deja arar y cavar, pero las bombas que caen constantemente sin tregua, impidiendo que sus heridas cicatricen, hacen que esta se revele y cree un monstruo igual de horrible que la propia guerra.
En el cuarto y último relato ambientado en Palermo en los años noventa, el juez Falcone, que fue asesinado por la mafia, rememora transformado en un narrador que conoce el pasado y el futuro, el asesinato de su compañero el juez antimafia Borcellino y narra su propio asesinato en tiempo presente. De nuevo las heridas, en este caso morales, de una tierra, Sicilia, se reflejan con su imagen real más que con una metáfora.
Los cuatro relatos nos presentan a sus protagonistas al borde del abismo. Tal y como podéis leer en la entrevista que sigue, Laurent Gaudé cuenta que contrapone a sus protagonistas a la muerte por estar llenos de vida y huye de lo morboso. Espero que lo disfrutéis.
" La forme de la nouvelle me permet de travailler sur le ciselé"
Dramaturge et romancier, prix Goncourt pour Le soleil des Scorta en 2004, Laurent Gaudé revient avec un recueil de nouvelles. Un vieil homme ayant fait la campagne d’Abyssinie, un centurion romain, un soldat de la première guerre mondiale et un juge anti-mafia : quatre personnages au bord du gouffre se remémorant leur vie. Les mêmes Enfers hantent l’écrivain toujours habité par l’Italie.
L’écriture de vos nouvelles court sur plusieurs années. Dans quelles circonstances sont-elles nées ?
C’est un travail que j’arrête et reprends, en marge de l’écriture de mes romans. C’est agréable comme une respiration qui permet de m’échapper du reste. Chez moi par miracle, l’idée nait chaque fois avec sa forme. Je sais dès le départ, si je vais écrire un texte court ou long. J'apprécie les nouvelles car elles permettent de plonger en quelques pages à peine dans l'Histoire lointaine, de cristalliser des problématiques. Je me place très modestement du côté de Jorge Luis Borges, ses textes constituent un modèle pour moi.
Dans Les oliviers du Négus, la mort est très présente. Etes-vous pessimiste ou est-ce un sujet littérairement fascinant et riche ?
Cette attirance n’a rien de morbide. Même si mes nouvelles ne sont pas très gaies, elles ne sont pas macabres mais porteuses de vie. Ce qui m’intéresse c’est de montrer des personnages traversés par un souffle, animés par une violence, une présence. D’un point de vue purement littéraire, saisir quelqu’un sur le point de mourir est pratique car on peut lui faire embrasser tout son passé, pour mettre en scène des flash-back c’est le moment idéal.
Dans Je finirai par terre, vous évoquez la guerre de tranchées dans l’Artois, dans Les oliviers du Négus, vous revenez sur les massacres en Abyssinie. Les guerres vous obsèdent-elles ?
Je me sens surtout interpellé par la décolonisation. Sans m’auto flageller car ma génération n’est pas responsable de la colonisation, nos pays ont une dette vis-à-vis de l’Afrique. En réalité dans la première nouvelle, ce n’est pas tant la guerre d’Ethiopie qui est au centre du récit, mais plutôt la juxtaposition de trois temporalités en un seul lieu, les Pouilles. Frédéric II, roi du Royaume des Deux-Siciles, le Négus et le narrateur foulent les mêmes routes, vont sur les mêmes places et entrent dans les mêmes églises à des siècles d’intervalle.
Le Négus s’oppose à la construction de villages de vacances sur la Côte. Ce texte a-t-il une sensibilité écologiste ?
Je n’aime pas le mot car il est trop connoté politiquement. En revanche, oui je me reconnais dans une approche à la Giono : je parle de la vie de la terre. La nature respire et les hommes ont tendance à l’oublier, ils ne la voient que comme un réservoir de ressources, c’est aussi un élément vivant et dommageable.
Dans Le bâtard du bout du monde, vous évoquez la chute de Rome. Qui était Caïus ?
En fait, il ne s’agit pas d’une période précise ni de personnages réels. J’ai parlé de Rome, j’aurais pu écrire Carthage. Je voulais montrer un monde sur le point de disparaître, décrire le rapport entre l’appartenance et l’étrangeté. Au départ le narrateur est un pur produit de Rome, un soldat bardé de certitudes, puis il vacille au contact de ceux que les Romains nommaient les Barbares. Il s’ouvre à ses ennemis et contemple la fin d’une civilisation.
Dans la dernière nouvelle, Tombeau pour Palerme, vous prenez la voix du juge Borcellino, témoin de l’assassinat du juge Falcone, peu de temps avant qu'il ne soit à son tour assassiné. Vouliez-vous leur rendre hommage ?
Oui, ce sont eux les héros de notre temps, pas les bandits. Je me souviens très bien de leur mort, cela a été un coup de semonce. Je me suis rendu en Sicile deux semaines après ces attentats, Palerme était en état de siège. Cette guerre était aussi une crise morale pour les Italiens, cela m’avait beaucoup marqué sans savoir que j’allais un jour écrire sur cet événement.
Pourquoi l’Italie se retrouve si souvent dans vos romans ? Avez-vous des racines italiennes ?
Ma femme a des origines italiennes, j’y vais très souvent depuis des années. Je m’y sens bien, quelque chose m’appelle là-bas, il y a une beauté, une émotion qui me touchent particulièrement et constituent une source permanente d’inspiration. Je connais surtout le Mezzogiorno (le sud).
Formellement, vous optez souvent pour des monologues…
C’est la meilleure manière d’entrer dans un personnage, de le faire parler. C’est aussi une passerelle entre le théâtre et l’épopée. A travers cette voix unique, les mots sont prononcés avec emphase (dans le bon sens du terme), le « je » est inspirant je trouve.
Qu’est-ce qui est le plus jouissif pour un écrivain : s’emparer d’un personnage qui a existé ou inventer ?
J’ai toujours abordé l’Histoire mais j’aime avoir les coudées franches ; si on doit respecter la véracité à la lettre, je me sens prisonnier. Néanmoins, pour Tombeau à Palerme, j’ai fait beaucoup de recherches, je suis imbibée de la réalité puis je m’amuse.
Propos recueillis par Nathalie Six pour le Mag des Espaces culturels Leclerc de mai 2011.
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